Une appellation à plusieurs visages

Officiellement reconnue en 1977, l’AOP Côtes du Roussillon couvre près de 5 000 hectares, de la vallée de l’Agly aux Albères, jusqu’aux confins des Pyrénées orientales. Elle regroupe des rouges intenses, des rosés gorgés de soleil, et plus rarement des blancs vibrants. Trois zones principales se distinguent au sein de cette appellation :

  • Côtes du Roussillon, l’appellation générique, majoritairement en plaine, sur des sols alluviaux et de galets roulés.
  • Côtes du Roussillon Villages, plus restreinte, centrée sur l’Agly et les contreforts des Corbières, avec des rendements plus faibles et une exigence accrue.
  • Côtes du Roussillon Villages suivie de commune (Caramany, Latour-de-France, Lesquerde, Tautavel), pour des expressions encore plus locales, sur des sols très caractérisés.

Ce morcellement reflète la complexité géologique du Roussillon : arènes granitiques, schistes noirs, calcaires déchiquetés, argiles féruginieuses. Des terres pauvres, vivantes, qui impriment leur signature dans chaque bouteille.

L'AOP Côtes du Roussillon se divise en trois zones : plaine alluviale, villages sur les contreforts des Corbières, et expressions locales, chaque sol reflétant la géologie unique du Roussillon.

Les cépages, entre mémoire et modernité

Si le Grenache noir est roi dans les rouges, il partage souvent l’affiche avec le Carignan, la Syrah et le Mourvèdre. Les vieilles vignes de Carignan, longtemps mal aimées, reviennent en force : travaillées en macération douce ou en vendange entière, elles offrent des jus d’une énergie brute et racinaire.

Côté blanc, on croise le Grenache blanc et gris, le Macabeu, parfois le Vermentino ou le Roussanne. Leur acidité reste discrète mais précieuse dans ce climat méditerranéen marqué par la sécheresse et la chaleur. Le travail à la vigne, les vendanges matinales et les vinifications sur lies sont autant de clés pour garder fraîcheur et tension.

Le Grenache noir domine les rouges, accompagné du Carignan, Syrah et Mourvèdre, avec des vieux Carignan offrant des jus puissants et racinaires.

Un climat qui forge le caractère

Tramontane, marin, soleil cuisant, orages d’altitude : le Roussillon est un laboratoire climatique à ciel ouvert. Ce n’est pas un hasard si nombre de vignerons y expérimentent aujourd’hui des pratiques agronomiques innovantes : paillage, agroforesterie, enherbement, travail en biodynamie ou en sec absolu.

L’effet millésime est fort. Les 2018, souples et légers, contrastent avec les 2019, denses et solaires. Les 2021, plus rares, gagnent en finesse. Il faut apprendre à lire le paysage, les strates du sol, la direction des vents, comme on lit un livre ouvert. Le vigneron devient interprète, pas maître.

Le Roussillon, laboratoire climatique avec tramontane, soleil et orages, voit des vignerons expérimenter des pratiques agricoles innovantes comme la biodynamie et l'agroforesterie.

Des vins pluriels mais lisibles

Ce qui frappe dans les Côtes du Roussillon, c’est cette capacité à offrir des vins de caractère, sans rigidité. Des rouges profonds, mais jamais écrasants. Des rosés qui osent la gastronomie. Des blancs étonnamment ciselés. Les assemblages, autorisés et même encouragés par le cahier des charges, permettent une grande liberté de style.

Ce sont des vins qui parlent haut, mais jamais fort. Ils portent le Sud, oui, mais sans tomber dans la caricature. Ils méritent qu’on les attende quelques années. Ils savent aussi surprendre jeunes. Ils invitent à la table, au partage, à la cuisine des racines.

Les Côtes du Roussillon offrent des vins de caractère, des rouges profonds, des rosés gastronomiques et des blancs ciselés, grâce à des assemblages libres.

Quels enjeux pour demain ?

L’AOP Côtes du Roussillon se trouve aujourd’hui à un carrefour. Entre valorisation de ses terroirs et nécessité de se faire connaître hors de ses frontières. L’effervescence actuelle autour des vins naturels ou en conversion bio y trouve un terreau fertile. De plus en plus de jeunes vigneronnes et vignerons s’installent, souvent en rupture avec les modèles productivistes.

Mais la reconnaissance reste fragile. Il y a encore peu de grands distributeurs ou de critiques à l’affût de ces cuvées. C’est donc aussi à nous, amateurs, passionnés, professionnels, de les faire découvrir, de raconter leurs nuances, de les placer à hauteur d’homme.

Car le Roussillon est tout sauf un vin d’étiquette. C’est un vin de bouche. Un vin de terre et de regard. Un vin qui prend le temps, qui mérite qu’on le goûte avec attention. Il ne demande qu’à parler. Encore faut-il l’écouter.

Tous les articles

Publications